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19/11/20

Prendre en compte les pollutions

Par la connaissance : c’est la piste creusée autour de l’étang de Berre. Depuis de longues années et l’installation de nombreux sites Seveso, d’ICPE, d’un incinérateur, la question des pollutions autour de l’étang de Berre revient régulièrement sur le devant de la scène. Ces conflits récurrents sont à l’origine d’initiatives inédites. Ce territoire s’est, en effet, doté d’outils et de compétences scientifiques. L’Institut Ecocitoyen pour la connaissance des pollutions a ainsi été créé en 2010. Aujourd’hui il n’a pas d’équivalent en France et en Europe. Pourtant, il est venu combler un manque qui, logiquement, doit être ressenti sur l’ensemble du territoire national. 

En effet, les réglementations sur les pollutions posent un cadre global indispensable mais elles présentent l’inconvénient de ne pas intégrer les spécificités locales. Pour exemple, à Fos-sur-Mer, 80% des particules émises dans l’air sont ultra-fines et aucune mesure n’est prévue en la matière. Les outils développés par l’institut Ecocitoyen permettent d’aller au-delà des diagnostics et études générales pour prendre en compte la situation réelle, suppléer au manque de connaissances scientifiques et répondre aux enjeux du territoire. 

Cette approche, développée sur toutes les pollutions générées par l’humain dans l’air, les milieux aquatiques et les sols, est mise au service de la connaissance scientifique et de l’accompagnement des acteurs locaux. Pour tenir ce cap et ancrer leurs actions en fonction des besoins du territoire, cet institut a deux aiguillons : les collectivités et l’observatoire citoyen de l’environnement. Cet observatoire regroupe environ 100 volontaires qui participent à la définition stratégique des actions de l’association, à la collecte des données et à la phase d’interprétation. 

10 ans après sa création, cet institut, porté principalement par la ville de Fos-sur-Mer et la Métropole Aix Marseille Provence, intervient essentiellement dans l’agglomération marseillaise. Les compétences et le savoir-faire développés pourraient essaimer et être mis au service d’autres territoires. AMARIS propose le 12 mars un échange entre ses adhérents et le directeur de l’Institut Ecocitoyen, Philippe Chamaret. 

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Crédits photo Institut Ecocitoyen


25/09/19

Projet Réponses : un nouveau chapitre?

« L’expert n’a plus le monopole de poser les questions et d’apporter les réponses »

Lors de la présentation de Réponses à une délégation AMARIS, un représentant de la Métropole de Lyon a ainsi résumé l’aspect le plus singulier du projet : « L’expert n’a plus le monopole de poser les questions et d’apporter les réponses ».

Ce changement de méthode est en partie liée au fait que ce projet a pour origine une crise médiatique survenue en 2017. A la suite de la parution des résultats inquiétants d’une étude de ressenti sur l’impact de la pollution sur la santé, la presse s’était emparée de ce sujet et avait relayée les inquiétudes des habitants.

Sous pression, les acteurs réunis au sein du SPPPI Paca (associations, représentants d’industriels et de salariés, collectivités, services de l’État) ont pris conscience de la nécessité de reconsidérer leurs méthodes, outils, etc. de travail peut-être trop descendants et verticaux, qui ne fonctionnent pas ou plus. Cette crise médiatique avait notamment révélé que les actions mises en œuvre et portées par les acteurs du territoire n’étaient pas connues ou ne répondaient pas aux besoins. Cette remise en question les a conduits à lancer une démarche ayant pour point de départ les besoins des populations.

Moins d’une année pour recenser, proposer et répondre concrètement

Déployé sur 21 communes du pourtour de l’étang de Berre, ce projet, porté et coordonné par le SPPPI Paca, a démarré en juin par un recensement des attentes de la population concernant la qualité de l’air, toutes sources confondues.

Afin de mailler le territoire et de toucher des publics non historiquement engagés, plusieurs dispositifs ont été déployés pendant 4 jours :
– 14 micros-trottoirs afin d’aller à la rencontre d’un public « non-averti » qui n’a pas l’habitude de s’exprimer sur ce sujet ;
– 8 ateliers avec des associations permettant des échanges approfondis sur trois thématiques (le dialogue avec les citoyens, le rôle des acteurs du territoire et la qualité de l’air) ;
– 4 forums ouverts à tous sur des sujets définis par les participants (les mesures de contrôle, l’information, les pollutions autres qu’industrielles, le développement du territoire, la co-construction du plan d’actions, la place des citoyens).

600 contributions ont été recueillies en juin. Actuellement, un travail d’identification des actions à mettre en place ou à faire connaître est en cours. Deux temps d’échanges avec la population seront organisés d’ici la fin de l’année pour qualifier la pertinence des réponses apportées et restituer le plan d’actions mis en place par les acteurs.

« La réponse sera-t-elle à la hauteur des attentes ? »

Jean Hetsch, le maire de Fos-sur-Mer, pose ouvertement cette question car le projet a un objectif ambitieux : apporter des réponses aux préoccupations et attentes des habitants et usagers du territoire en santé-environnement. Cet objectif comporte de fait une part de risque. C’est peut-être pourquoi certaines précautions ont été mises en place pour que le volet concertation soit irréprochable (outre le fait que le projet repose sur la qualité des échanges avec la population). Ainsi, un panel de citoyen a été recruté par voie de presse pour suivre, ajuster le déroulé de la concertation et être attentif à la fidélité du rendu. Un garant de la Commission Nationale du Débat Public veille à la qualité d’écoute, la neutralité, la transparence et l’égalité de traitement des personnes.

 

Le projet Réponses

– Il est piloté par un comité composé de représentants d’associations, de collectivités (Vitrolles, Fos et Aix-Marseille Métropole) de l’État (DREAL, ARS et GPMM), d’industriels, de salariés et d’experts dont Atmo sud.
– Il est financé par de façon collégiale par l’État, les collectivités et les industriels.
– Il est porté et coordonné par le SPPPI Paca.
– Plus d’informations : le site du SPPPI Paca

Photo : Michel SERRA, Ville de Fos-sur-Mer


27/07/17

Le guide de mise en œuvre des SIS

Secteurs d’information sur les sols (SIS) – rappel
La loi Alur a modifié, en 2014, l’article L.125-6 du Code de l’environnement. La principale modification apportée réside dans la création de secteurs d’information sur les sols (SIS) annexés aux documents d’urbanisme. Ces SIS concernent les terrains où la connaissance de la pollution justifie la réalisation d’études de sols et de mesures de gestion.

L’objectif est de favoriser une meilleure diffusion de l’information pour qu’elle soit prise en compte non seulement lors de la délivrance des autorisations d’urbanisme mais également dans les politiques de planification urbaine. L’enjeu est de favoriser cette diffusion tout particulièrement auprès des pétitionnaires d’autorisations d’urbanisme et ainsi de sécuriser les maires dans l’attribution des permis de construire portant sur des terrains pollués.

Le calendrier fixé par la loi prévoit que les SIS soient élaborés entre le 1er janvier 2016 et le 1er janvier 2019. Les collectivités (communes et/ou intercommunalités compétentes en matière d’urbanisme) seront informées par courrier de la mise en place des projets de listes de SIS. Les préfets arrêteront ensuite les projets de listes de secteurs élaborés par les services de l’État et consulteront les collectivités. Ces dernières auront alors 6 mois pour rendre un avis et faire part de leurs observations.

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Les adhérents d’AMARIS particulièrement concernés
Si ce guide s’adresse à toutes les collectivités, les territoires accueillant ou ayant accueillis des installations industrielles sont plus particulièrement concernés. En effet, ces activités ont pu générer des pollutions des sols.

Les adhérents d’AMARIS sont potentiellement très concernés. Depuis 3 années, AMARIS reste donc en alerte sur cette thématique. L’association a fait partie du GT expérimental qui a contribué à l’écriture de ce guide. Elle est également représentée dans le groupe d’experts sur les sites et sols pollués auprès du CSPRT.

Le contenu du guide
Ce guide très complet fournit notamment :
> des informations générales sur la politique de gestion en France et les différents outils à connaître ;
> des exemples de collectivités qui ont déjà intégré l’information sur la pollution dans leurs documents d’urbanisme : Le Havre dans la note de présentation du PLU, la métropole de Lyon dans les certificats d’urbanisme, etc.
> les modalités d’application de l’article L.125-6 du Code de l’environnement.

Dans ce guide et dans le guide à destination des DREAL, le ministère de la Transition écologique et solidaire précise également deux points qui ne sont pas encadrés réglementairement :
> la méthode d’élaboration des SIS (dans le guide à destination des DREAL, il est proposé une méthodologie qui précise des critères d’identification et de cartographie) ;
> les échanges avec les collectivités : préalablement à la consultation pour avis des collectivités encadrée par le décret d’application, le Ministère incite les DREAL à se rapprocher des collectivités dans le cadre de consultations « informelles et non obligatoires ».

Participer au travail d’élaboration des SIS : un enjeu pour les collectivités
Ces consultations nous semblent indispensables car les collectivités connaissent leurs territoires. Elles pourront faire part des informations dont elles disposent. Par exemple, sur les sites où les probabilités de mutation vers des usages sensibles est faible, elles peuvent ne pas juger prioritaire l’inscription d’un terrain dans la liste des SIS. Le guide propose que ce critère de susceptibilité d’un changement d’usage au regard du PLU peut être pris en considération à l’occasion de cette concertation. En revanche, cette approche nécessite des discussions avec les services de l’État. Il est important que les collectivités participent à ces discussions préalables tout particulièrement dans les territoires où le nombre de SIS est élevé. Ce guide recommande cette consultation préalable et permet aux collectivités de se saisir de la question.

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19/11/15

Loi Alur et décrets

meddeLe décret sur le tiers demandeur a été publié le 18 août 2015.

Pour rappel, la loi prévoit la possibilité pour un aménageur de se substituer au dernier exploitant d’une ICPE pour l’exécution de son obligation de réalisation de travaux de réhabilitation après mise à l’arrêt. Le décret organise cette procédure de substitution d’un « tiers-demandeur » au dernier exploitant.

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Le décret sur les secteurs d’information sur les sols est paru le 26 octobre 2015.

La loi ALUR prévoit que l’État élabore des secteurs d’information sur les sols (SIS) qui seront intégrés dans les PLU par une mise à jour des annexes. Le décret précise que ces SIS seront créées avant le 1er janvier 2019 et définit les modalités de mise en œuvre (élaboration par les services de l’Etat, avis des collectivités dans un délai de 6 mois, mise à jour des SIS, etc).
Lorsqu’un maître d’ouvrage change l’usage d’un terrain situé dans secteur d’information sur les sols SIS, il doit réaliser une étude de sols. Pour les projets soumis à permis de construire ou d’aménager, le maître d’ouvrage fournit dans le dossier de PC une attestation établie par un bureau d’études certifié dans le domaine des sites et sols pollués, garantissant la réalisation de cette étude. Ce modèle d’attestation est toujours au travail.
Un guide méthodologique à destination des collectivités est en cours de finalisation.

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Le projet de décret sur la responsabilité et la clarification sur la notion de propriétaire négligeant est toujours en discussion.

 


25/03/15

Secteurs d’information sur les sols pollués (SIS)

AMARIS a suivi l’élaboration du décret mis en consultation depuis le 19 mars. L’association n’a pas manqué de rappeler que, sans une dynamique de travail et une concertation entre les services de l’Etat et les collectivités, les secteurs d’information sur les sols (SIS) auraient un effet contraire à celui visé par la loi, à savoir la reconquête des friches industrielles.

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Rappel

Voté en mars 2014, l’article 173 de la loi ALUR a modifié le code de l’environnement en matière de sites et sols pollués. Il a tout particulièrement introduit des dispositions pour améliorer la connaissance et la rendre disponible par le biais des secteurs d’information sur les sols (SIS). L’État élaborera des secteurs d’information sur les sols (SIS) et les portera à la connaissance des collectivités compétentes pour qu’ils soient intégrés dans leurs documents d’urbanisme. Lors de la cession d’un terrain, le vendeur informera l’acquéreur s’il est en SIS. Dans le cadre des demandes de permis de construire ou d’aménager, le pétitionnaire fournira une attestation établie par un bureau d’études certifié précisant que le projet a fait l’objet d’une étude de sols et que l’usage prévu est compatible avec le secteur.

Lire l’interview de Vincent Sol, avocat spécialisé en droit de l’environnement


05/10/14

SIS – Rencontre AMARIS

Les nouvelles dispositions législatives
Présentation – Aurélien Louis, chef du bureau des sols, DGPR.

La loi ALUR du 24 mars 2014 a pour objectif de répondre au double enjeu de la dynamisation de la construction de logements et de la préservation des espaces naturels et agricoles. Son article 173 sur les sites et sols pollués répond à ces enjeux. Il prévoit :
1. Des dispositions pour améliorer la connaissance et la rendre disponible : l’État va élaborer des secteurs d’information sur les sols (SIS) qui seront intégrés dans les PLU par une mise à jour des annexes. Les SIS ne sont pas des SUP ; ils feront l’objet d’un porter à connaissance.
Lors de la cession d’un terrain, le vendeur informera l’acquéreur s’il est en SIS. Dans le cadre des demandes de permis de construire ou d’aménager, le pétitionnaire fournira une attestation établie par un bureau d’études certifié précisant que le projet a fait l’objet d’une étude de sols et que l’usage prévu est compatible avec le secteur.
2. Des dispositions autorisant l’intervention d’un tiers pour mener la réhabilitation du site. Jusqu’à présent, cette obligation incombe au dernier exploitant. La loi ALUR permet de transférer cette obligation à un tiers. La prise en charge des coûts de dépollution sera donc à négocier lors de la vente du terrain.
3. Une clarification de la responsabilité des acteurs. Il existe désormais 2 rangs de responsabilités : 1. Le dernier exploitant ou le tiers substitué ou le maître d’ouvrage qui a pris la suite ou le producteur de déchets si ce n’est pas une ICPE. 2. Le propriétaire négligent.

Trois décrets, en cours de rédaction, concernent ces différents points. En 2012, la DGPR a mis en place, dans le cadre des travaux du groupe « sites et sols pollués » du CSPRT, un groupe d’expérimentation de la mise en œuvre des dispositions de l’article L.125-6. Ce groupe rassemblait services de l’Etat et collectivités territoriales (notamment les villes du Havre et de La Rochelle). L’objectif était d’identifier les modalités pratiques de la mise en œuvre des dispositions alors envisagées. Les travaux seront relancés prochainement et pourraient être orientés sur les questions concrètes que se posent à l’heure actuelle les acteurs de terrain.

Télécharger la présentation de la DGPR

Retour d’expérience de la ville du Havre
Présentation – Antoine Ilef, Ville du Havre.

Le contexte

Le Havre connaît deux grandes tendances en matière de sols pollués : des pollutions liées aux activités exercées (étendues limitées, concentrations parfois élevées, mesures de gestion spécifiques ou restrictions d’usages), et des pollutions liées aux remblais urbains (pollution diffuse, traces de polluants, mesures préventives).
Des diagnostics de sols sont réalisés quasi-systématiquement dans les projets conduits par la ville (cession et acquisition de terrain, aménagement), et de nouveaux outils ont été développés. Un inventaire historique local a été réalisé sur les sites à enjeux urbains (163 hectares). Un SIG a été créé.

Les enseignements issus du GT

En 2013, la ville a participé aux réunions préalables à la publication de la loi ALUR. Nous avons particulièrement travaillé sur la définition des secteurs d’information sur les sols et creusé les points suivants :
– l’utilisation de BASOL comme référence mais nécessitant des évolutions ;
– la prise en compte des usages ;
– les mises à jour ;
–  le rôle et les responsabilités du maire ;
– la mise à disposition des données par l’État ;
– le besoin de documents graphiques complétant les listes de parcelle concernées par le SIS.

La réflexion portait également sur les certificats d’urbanisme, et les données qui devront y figurer. Le certificat d’urbanisme indique si le projet est situé dans un SIS, sur un ancien site industriel et activités de services répertorié par BASIAS (729 au Havre), sur tout ancien site industriel ou de service dont le service instructeur a connaissance. Des questions se sont posées sur la précision des données BASIAS, et sur la responsabilité du maire par rapport, notamment, à l’inventaire historique local.

Télécharger la présentation de la ville du Havre

Retour d’expérience de la ville de La Rochelle
Présentation – Cécile Glemain-Groult, Ville de La Rochelle.

Le contexte

La Rochelle n’a que quelques sites concernés par la problématique de la pollution des sols. Ce sont des sites d’une emprise assez réduite, et localisés dans la zone industrielle. Il n’y a pas de problématique de reconquête des friches. La ville a été choisie pour participer au GT car la situation du foncier est tendue.

Les enseignements issus du GT

Pour nous, aujourd’hui, certaines questions restent en suspens :
– Les certificats d’urbanisme se réfèrent uniquement aux documents annexés au PLU. Faut-il annexer les sites BASIAS au PLU, malgré le manque de précision de cette donnée ?
– Le maire doit donner son avis sur ces sites. Quelle valeur, cet avis a-t-il ?

Synthèse des échanges

Les 7 points qui ont été particulièrement discutés

  • Le délai de 3 mois donné aux maires pour rendre un avis sur les SIS. Il a été souligné qu’il y aura une concertation sur les SIS avant le PAC.
  • La mise en œuvre des SIS. Il semble important que l’élaboration des SIS s’inscrive dans le même timing que celui des PLUI. Les SIS doivent être le résultat d’un échange tenant compte de l’expertise de chacun des acteurs.
  • L’échelle pertinente . La mise en œuvre de ce décret pourrait s’effectuer à l’échelle de territoire de projet. Celle des SCoT semble la plus pertinente. C’est un document d’aménagement, de planification, avec une entrée davantage politique que technique. Cela permettrait de donner un sens aux SIS.
  • L’empilement des zones à risque et des réglementations environnementales sur un même territoire.
  • La prise en charge de la dépollution dans le cadre des mesures foncières liées aux PPRT.
  • L’accompagnement des collectivités : quelles « ressources » mettre à disposition des collectivités qui n’ont pas les compétences techniques et juridiques nécessaires ?
  • La concertation avec les collectivités. L’écriture de la méthode de concertation est indispensable afin que ce point ne soit pas oublié, les DREAL ayant des pratiques de concertation très différentes. Cf la procédure PPRT.

 

Les sujets identifiés à traiter

  • Les calendriers de mise en œuvre
  • La bonne coordination SIS, PLU, PLUI (réforme territoriale), SCOT
  • L’accompagnement des collectivités
  • Les modalités de concertation
  • La prise en compte des pollutions dans le cadre des mesures foncières PPRT.

25/04/14

Sites et sols pollués : interview de Vincent Sol

L’article 173 de la loi ALUR modifie le code de l’environnement en matière de sites et sols pollués. Comment cette question était-elle traitée auparavant ?
En France, la pollution des sols par les activités industrielles fait l’objet d’une prise de conscience récente et largement postérieure au début de la désindustrialisation. La politique française en matière de sites et sols pollués n’avance donc que depuis une vingtaine d’années, et ce, principalement sur le plan technique. Il n’y a eu pas de loi structurante ; ce sont les juges qui créent le droit. Pour traiter la première grande affaire en la matière, à savoir la pollution liée à la présence de la décharge de Montchanin, la base juridique utilisée a été la loi ICPE et le principe du pollueur-payeur (le dernier exploitant prend en charge la dépollution). Depuis 15 ans, la jurisprudence est hésitante et ne compense pas l’absence d’un dispositif législatif et réglementaire spécifique.
Le sujet central est la recherche du responsable pour savoir qui paie ?
Oui. Pour déterminer la responsabilité, deux lois sont utilisées : la loi ICPE et la loi déchets. Elles mettent en cause ou non le propriétaire au gré des jurisprudences. Résultat : les conflits entre vendeurs et acquéreurs ne cessent d’augmenter. En 2 ans, le nombre de contentieux civils a été multiplié par trois.
En quoi la reconversion des friches industrielles est-elle un enjeu ?
Environ 300 000 sites sont potentiellement pollués. Ces friches représentent, quand elles sont situées en milieu urbain, une réserve de foncier stratégique. Leur reconquête ouvrira des opportunités en matière de création de logements, de renouvellement urbain et de requalification des espaces publics. Il devient donc indispensable de créer des outils urbanistiques adaptés, d’anticiper le risque de pollution et de l’intégrer dans les projets, tout particulièrement lors de la négociation financière des terrains. Il faut poser un cadre pour solder le passé (l’héritage de la désindustrialisation) et traiter les pollutions connues. L’expérience montre que plus la question est traitée en amont, moins cela coûte cher. On peut, en effet, adapter les projets ou les techniques de traitement.
Pouvez-vous nous présenter les grandes lignes de l’article 173?
Ce texte, travaillé par le groupe d’experts du CSPRT, a obtenu un consensus de toutes les parties prenantes, du MEDEF jusqu’à FNE. L’article 173 prévoit :
a. Des dispositions pour améliorer la connaissance et la rendre disponible : l’État va élaborer des secteurs d’information sur les sols (SIS) qui seront intégrés dans les PLU. Lors de la cession d’un terrain, le vendeur informera l’acquéreur s’il est en SIS. Dans le cadre des demandes de permis de construire ou d’aménager, le pétitionnaire fournira une attestation établie par un bureau d’études certifié précisant que le projet a fait l’objet d’une étude de sols et que l’usage prévu est compatible avec le secteur. Ainsi, la loi ALUR crée des obligations pour les vendeurs et pour les acquéreurs. Elle oblige également le vendeur à informer la collectivité, dans les DIA, dans les cas de préemption.
Par ailleurs, l’Etat publiera une carte des anciens sites industriels où les sols sont potentiellement pollués. Cette carte devra être utilisée lors de la délivrance des certificats d’urbanisme. La loi ALUR incite ainsi les collectivités à intégrer la problématique des sites et sols pollués dans leurs politiques d’aménagement et à s’emparer de la question du renouvellement des friches industrielles.

b. Des dispositions autorisant l’intervention d’un tiers, notamment les collectivités, pour mener la réhabilitation du site. Jusqu’à présent, cette obligation incombe au dernier exploitant. La loi ALUR permet de transférer cette obligation à un tiers (un aménageur ou un promoteur immobilier). La prise en charge des coûts de dépollution sera donc à négocier lors de la vente du terrain. Cette disposition est de nature à inciter les exploitants à céder, plus facilement, leurs biens. Aujourd’hui beaucoup préfèrent ne pas vendre car leur responsabilité reste engagée pendant 30 ans.
Enfin, le tiers fournira une garantie financière et technique à l’Etat. En cas de défaillance financière, l’Etat pourra se retourner vers le dernier exploitant, à hauteur de ce que celui-ci aurait dû réaliser pour réhabiliter le site.

c. Une clarification de la responsabilité des acteurs. Il existe désormais 2 rangs de responsabilités : 1. Le dernier exploitant ou le tiers substitué ou le maître d’ouvrage qui a pris la suite ou le producteur de déchets si ce n’est pas une ICPE. 2. Le propriétaire négligent.

Quelle est la prochaine étape ?
Cette loi pose les grandes bases. Les décrets à venir répondront aux questions plus techniques mais très importantes comme celle, par exemple, de définir ce que recouvre la notion de propriétaire négligent notamment pour une collectivité qui veut redévelopper un terrain pollué.

Pour Amaris qui fait partie du groupe de travail « sites et sols pollués », il s’agira de s’impliquer afin que le dispositif mis en place soit cohérent avec les enjeux des collectivités.

En savoir plus : Article 173 de la loi ALUR