Aujourd’hui, la réglementation ne suit que quelques polluants : principalement certains métaux (au niveau national) et le dioxyde de soufre (mesuré sur 15 minutes). Cela reste insuffisant pour évaluer réellement la qualité de l’environnement dans les zones industrielles. C’est pourquoi certaines collectivités choisissent de mettre en place des suivis complémentaires, afin de mieux comprendre les sources de pollution, leur toxicité et les actions possibles. Mais elles se heurtent parfois à un manque de compétences techniques pour répondre aux inquiétudes des habitants, en complément ou à la place des services de l’État.
Exemples de suivis existants
> Air : surveillance par les AASQA (Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air)
> Eau : suivi dans le cadre de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE)
> Industrie : contrôle des activités site par site, imposé par arrêté préfectoral et assuré par l’industriel ou un bureau d’études.
PRINCIPES
>> Chaque suivi repose sur une notion de « normalité » servant de référence. Une fois un polluant mesuré, on compare le résultat à des valeurs limites, fixées selon sa toxicité. Ces seuils définissent ce qu’il ne faut pas dépasser. Pour les sols, cette référence correspond au « bruit de fond » naturel, qui varie selon le type de territoire (zone humide, forêt, etc.).
>> Un suivi efficace doit être adapté au contexte local. Par exemple, la pollution de l’air ne se mesure pas de la même manière à Dunkerque qu’à Limoges.
>> Comprendre ces différences est indispensable pour identifier les sources de pollution et évaluer leur toxicité.
LIMITES
>> Les dispositifs de suivi ne sont pas toujours adaptés au contexte local.
>> Il peut manquer de bases de référence claires pour interpréter correctement les résultats.
Mesurer la présence de polluants chimiques dans l’organisme (sang, urine, cheveux, etc.) et suivre leur évolution au fil du temps.
PRINCIPES
• Ces études permettent de suivre le comportement des polluants dans le corps. Elles montrent quels polluants passent dans l’organisme, mais ne cherchent pas directement à établir un lien avec des maladies.
• Elles orientent les recherches en santé publique et indiquent les priorités pour réduire l’exposition des populations.
Il existe deux grandes approches méthodologiques :
1. Méthode comparative entre population exposée et non exposée afin de déterminer (ou pas) des différences.
2. La méthode cas témoin : en pratiquant des prélèvements sur une population puis en séparant les individus présentant des différences pour enquêter et trouver la cause de la marque, ou non, d’un caractère environnemental.
Exemples d’études nationales
> Esteban : étude de Santé publique France sur la population générale (adultes et enfants).
> Cohorte Elfe : suivi de femmes enceintes et de leurs enfants.
> Études autour des incinérateurs : biosurveillance menée par l’InVS.
LIMITES
>> Ces études doivent être bien comprises pour éviter de fausses attentes.
>> Elles ne permettent pas, sauf rares exceptions (ex. : le plomb), d’établir un lien direct entre une exposition et une maladie précise.
>> Leur objectif n’est pas de répondre à un problème médical immédiat, mais de mieux comprendre l’exposition aux polluants.
Un protocole très demandé mais avec des limites
Les études épidémiologiques sont souvent considérées comme la référence absolue. Elles apparaissent très tôt dans les demandes des élus et des citoyens lorsqu’il est question de santé et d’environnement.
PRINCIPES
>> En santé environnementale, ces protocoles consistent à croiser deux cartes : celle des expositions aux polluants et celle des pathologies observées.
>> Elles permettent de rechercher un lien de causalité entre une exposition et une maladie.
>> Elles visent à répondre à une question précise.
>> Elles nécessitent de bien connaître la vie des personnes étudiées : antécédents familiaux, habitudes alimentaires, activités professionnelles ou de loisirs, etc. Ces informations sont recueillies via des questionnaires et complétées par des données socio-économiques (INSEE). L’objectif est d’écarter les « facteurs de confusion » (par exemple : un cancer lié à une prédisposition familiale plutôt qu’à une exposition environnementale).
LIMITES
>> Ces études sont très lourdes à mettre en place : formulation précise de la question, nombreuses étapes de validation méthodologique et éthique, mobilisation de nombreux partenaires.
>> Elles nécessitent un grand nombre de participants. Or, dans un bassin industriel, certains cancers sont trop rares pour obtenir des résultats statistiquement solides.
En pratique, il faut donc se demander si un tel niveau de précision est indispensable. Parfois, la simple mesure des expositions peut suffire pour guider les décisions politiques et mettre en place des mesures de prévention.
Les études EPSEAL sont des enquêtes sociologiques menées directement auprès des habitants, en porte-à-porte. Elles consistent à interroger les personnes sur les maladies qui leur ont été diagnostiquées médicalement.
Cette méthode répond avant tout aux inquiétudes citoyennes, car elle repose sur l’écoute et la proximité. C’est pourquoi elle occupe une place particulière. Actuellement, ce type d’étude se développe, par exemple avec une enquête menée par Santé Publique France à Lacq.
LIMITES
>> Les résultats ne peuvent pas être comparés aux données nationales, car les méthodes de collecte sont très différentes.
>> Les études EPSEAL donnent une image à un instant précis, sans permettre un suivi dans le temps.
Exemple : étude EPSEAL Fos–Port-Saint-Louis
> Cette enquête a mis en évidence une fréquence plus élevée de certaines pathologies (comme le diabète de type 1 et certains cancers).
> Dans un premier temps, les résultats ont été comparés aux données nationales de l’Assurance Maladie, mais les différences de protocole rendaient la comparaison impossible.
> Pour pallier cela, la même enquête a ensuite été menée sur un territoire moins exposé. Les écarts observés étaient alors plus faibles, notamment pour le diabète.
Cartographier les risques sanitaires en fonction de l’exposition aux polluants connus.
PRINCIPES
Cette approche est a priori parfaite. Elle permet de déterminer sur une carte, les points les plus « dangereux » et les sources. En théorie, cela permet de relier une source de pollution aux risques qu’elle entraîne.
LIMITES
>> Le principe déclaratif – Les études de zone sont fondées sur des cadastres d’émission (Le cadastre d’émission est le placement géographique des sources.) Les données relatives aux émissions utilisées pour faire fonctionner les modèles ne sont pas le fruit de mesures réalisées par les acteurs institutionnels. Ces données se fondent sur les déclarations des exploitants.
>> Une réalité de terrain lissée – Quand bien même ces déclarations sont fiables, elles sont imprécises dans la mesure où elles reposent sur des moyennes (des régimes normaux) intégrant de longues périodes. Les effets de pic, les phénomènes accidentels ou les situations météorologiques exceptionnelles sont lissés.
>> Une sélection des polluants pris en compte – l’ensemble des polluants ne sont pas pris en compte. Pour exemple, à Fos-sur-Mer, l’étude de zone qui a été réalisée ne prenait pas en compte les particules ultrafines alors qu’elles constituent environ 80% des particules mesurées dans l’air.
A RETENIR
>> C’est un outil très théorique, limité par l’état actuel des connaissances scientifiques.
>> L’étude de zone ne décrit pas la réalité qu’une biosurveillance peut décrire.